Pourtant, dans un contexte de révolution numérique, cela répond à des enjeux de politiques sociales très concrets (plans d’aides APA, doctrine d’investissement public et d’intermédiation, aménagements du territoire), d’autant plus que les pratiques numériques des seniors se sont affirmées depuis la pandémie de Covid-19.
Le séminaire est parti du fil conducteur constitué par le besoin d’évaluations et d’analyses partagées, un « centre de preuves » des technologies de l’âge étant en voie de préfiguration à la CNSA. Dans un contexte de structuration encore peu engagée de ce marché technologique, et alors que certains pays sont à la veille d’une montée en puissance orchestrée, plusieurs enseignements se dégagent en matière de maturité des technologies et de leurs usages, de questions éthiques et de la création de centre de preuves.
Programme :
9h15 - Ouverture par Bertrand Fragonard, Président HCFEA
Introduction par Vanessa Wisnia-Weill, Secrétaire générale adjointe HCFEA
9h30-11h30 - Session 1 : Quel possible ? Vers une cartographie des technologies pour le maintien à domicile des personnes âgées
Président de session : Luc Broussy, Président France Silver éco
Sont intervenus :
- Mohamed Chetouani, Professeur Sorbonne-Université (UMPC), responsable du Laboratoire d’Excellence SMART Human/Machine/Human Interactions, membre du Conseil scientifique de la CNSA – Présentation à télécharger
Technologies matures et émergentes et tendances dans la recherche : interaction hommes- machines et numérique - Jean-Frédéric Gerbeau, Directeur délégué à la science de l’Inria et Pascal Guitton, Professeur
Technologies matures et émergentes et tendances dans la recherche en numérique – Présentation à télécharger - Lucie Robieux, Consultante services publics, BCG.
Technologies et maintien des seniors à domicile – perspectives internationales – Présentation à télécharger
Discutants :
Véronique Chirié, Directrice Technopôle Alpes santé à domicile et Autonomie, et Pierre Mérigaud, Directeur de l’innovation Autonomlab
11h30-13h30 - Session 2 : Les services rendus par les technologies et les enseignements de la crise Covid-19 : quelle résilience pour qui ?
Président de session : Jérôme Guedj, Conseiller départemental de l’Essonne, chargé d’une mission ministérielle sur l’isolement des personnes âgées durant la crise COVID-19.
Sont intervenus :
- Hervé Michel, Directeur Madopa, centre expert et Living lab en technologies et services pour la santé et l’autonomie des personnes âgées.
Méthodes et résultats d’évaluations de technologies pour la santé et l’autonomie des personnes âgées à domicile – Présentation à télécharger - Carlos Moreno, Professeur des Universités, expert villes, territoires de demain, spécialiste du contrôle intelligent des systèmes complexes.
Mutations urbaines et territoriales : la crise de la Covid 19, les seniors et les mobilités inversées – Présentation à télécharger - Guénaëlle Gault, Directrice Générale de L'Observatoire Société et Consommation.
Numérique et COVID-19 : quelles modifications des usages des seniors ? Quels enjeux pour la résilience et l’autonomie à domicile ? – Présentation à télécharger
Discutants :
Sébastien Podevyn, Directeur Général France silvereco et Pierre Olivier Lefebvre, Délégué Général, Réseau Français des villes amies des aînés.
14h30-16h15 - Session 3 : Quelques questions éthiques appliquées
Président de session : Daniel Andler, Mathématicien et épistémologue, Membre de l’Académie des sciences morales et politiques, pilote du programme Technologies émergentes et sagesse collective.
Sont intervenus :
- Raja Chatila, Professeur d'Intelligence Artificielle, de Robotique et d'éthique, président de l'Initiative mondiale IEEE sur l'éthique des systèmes autonomes et intelligents, membre du groupe d'experts de haut niveau sur l'Intelligence Artificielle de la Commission européenne membre du Comité national d’éthique numérique.
Pour une conception éthique des technologies dès l’amont : éléments méthodologiques et perspectives européennes – Présentation à télécharger - Fabrice Gzil, Philosophe à l’Espace éthique Ile de France et Me Solenne Brugère.
Enjeux éthiques et juridiques – Présentation à télécharger - Frédérique Garlaud, Directrice nationale de l’action sociale, CNAV
Fractures numériques, inégalités d’accès aux technologies – Présentation à télécharger
Discutants :
Dr. Antoine Piau, Spécialiste silver technologies, gérontopôle d’Occitanie et Alain Villez, Président Petits frères des pauvres.
16h30-18h30 - Session 4 : Quels besoins d’informations pour le consommateur et les « prescripteurs » ? Quelle gouvernance pour quelle éthique de la preuve ?
Pour favoriser la diffusion à grande échelle des technologies, quels besoins de « preuves » et d’intermédiation, quelle éthique de la preuve ?
Président de session : Philippe Denormandie, Chargé d’une mission ministérielle sur les aides techniques.
Sont intervenus :
- Luc Broussy, Président France Silver éco.
Les recommandations de la filière silver-économie - Florian Forestier, Membre du Think tank Le plus important, et membre de l’équipe TESaCo.
Quels modèles de centres de preuves – enseignements de la santé et du numérique – Présentation à télécharger - Laure de la Bretèche, Directrice adjointe des retraites et de la solidarité, Caisse des dépôts.
Comment répondre aux besoins des « prescripteurs », financeurs et médiateurs ? – Présentation à télécharger - Jean-Paul Nicolaï, Chef économiste, Secrétariat général pour l’investissement.
Silver économie, modèles économiques de l’innovation et marchés subventionnés – Présentation à télécharger
Discutants :
Stéphane Corbin, Directeur adjoint, CNSA, Hubert Galmiche, Chef du Service Evaluation des Dispositifs, HAS.
télécharger les enseignements du séminaire
Résumé des enseignements du séminaire :
La question technologique reste à ce jour abordée à la marge des réflexions jalonnant la mise en place d’un 5e risque notamment du fait de la centration légitime sur les besoins en aide humaine. Pourtant, dans un contexte de révolution numérique, la diffusion et l’appropriation de ces technologies (par les personnes, les professionnels et les collectivités territoriales) constituent des enjeux de politiques sociales très concrets, par exemple s’il faut mieux inclure la technologie aux plans d’aides APA, dégager une doctrine d’investissement public et d’accompagnement social des vecteurs technologiques de l’autonomie au niveau d’un département, ou encore concevoir différemment l’aménagement du territoire à horizon 10 / 20 ans.
Dans un contexte de structuration de ce marché technologique encore assez peu engagée, et à partir d’un besoin identifié d’évaluations et d’analyses partagées, le séminaire interdisciplinaire du HCFEA a contribué à :
- mieux repérer la maturité des technologies et leurs usages (session I et II) ;
- dégager des pistes d’évolutions pour répondre aux enjeux éthiques (session III) ;
- dégager des points de consensus et les options à arbitrer en vue de la création d’un « centre de preuves et de ressources » (session IV).
Un fil conducteur a guidé l’ensemble du séminaire : éclairer le besoin de preuves, d’évaluations ou d’analyses partagées des technologies de l’âge, un « centre de preuves » étant actuellement en voie de préfiguration à la CNSA. Plusieurs enseignements se sont dégagés.
Les technologies de l’âge se développent dans de nombreux pays autour de trois types d’usages :
- la prévention des chutes et des risques, d’autant plus intéressante quand elle intègre une refonte plus globale du système de soin et d’intégration avec le médicosocial ;
- le déplacement des incidences des limitations fonctionnelles ;
- la facilitation de l’accès à des services génériques ou du développement d’activités sociales, culturelles et de relations humaines, qui s’inscrit dans une tendance à la plateformisation.
Ces technologies ont néanmoins des maturités très différentes (voir tableau 1, p. 7). Les plus utilisées restant aujourd’hui des applications sur mobiles et du numérique. Elles sont souvent moyennement sophistiquées. Même quand ils sont fiables et innovants, les produits ne sont pas toujours assez pertinents en condition de vie réelle. Alors que les seniors ne sont pas technophobes, le design de solutions « en écosystème », intégrant santé, habitat, mobilités, urbanisme et aménagements du territoire reste à écrire.
À ce stade, on ne peut pas parler d’un retard de la France. Néanmoins plusieurs pays semblent à la veille d’une montée en puissance orchestrée. Dans ce cadre, il manque à ce jour un portage interministériel suffisant pour favoriser des partenariats technologiques (recherche, industrie, medicosocial) autour de l’âge, plus développés et à visée exportatrice. Cela devrait aller de pair avec le développement des « infrastructures » de recherche facilitant les expérimentations (démonstrateurs, etc.) en amont et le recrutement plus aisé de cohortes par les équipes de recherche dans le champ de l’âge. Également, les équipements numériques permettant un partage, voire une utilisation des données en vue de suivi médical sécurisé, et une continuité des parcours entre les services gériatriques hospitaliers et le retour à la maison ou en Ephad doivent être mis en place.
Ensuite, des pistes se dégagent pour adapter le cadre normatif et répondre aux enjeux éthiques des développements en domotique et numérique à partir d’un socle de droits essentiels de la personne :
- consacrer le droit à la vie privée et à l’auto-information ;
- passer du recueil préalable de consentement à un droit de l’assentiment en cas de troubles cognitifs ;
- à l’instar des pratiques utilisées dans le domaine pénal, développer un rôle pour le juge des libertés dans certains usages sur « l’aller et le venir » nécessitant un consentement ou des alternatives (bracelet des géolocalisations) ;
- mieux cadrer le champ du partage des données (risques démultipliés de levée du secret médical et de ruptures des intimités dans le cadre de l’IOT qui étend l’accès à des données autrefois sous la responsabilité des médecins, sachant que le sous- équipement à l’hôpital favorise des suivis improvisés hors cadre éthique) ;
- pouvoir évaluer l’apport des solutions technologiques par rapport à l’existant et pas uniquement « dans l’absolu » ;
- favoriser un accès moins inégalitaire aux technologies notamment en intégrant des prestations de maintenance et de hot line des technologies et le développement des locations et du partage d’usage. Des accompagnements humains et une ingénierie sociale dans les lieux du quotidien des personnes âgées doit être organisé, sachant par ailleurs, que la fin de l’exclusion numérique n’est pas dissociable d’un fort rattrapage de l’équipement numérique à l’hôpital.
On le voit le centre de preuves ou de ressources ne lèvera pas seul tous les verrous, mais il est une pièce importante pour favoriser une meilleure appropriation des produits par les professionnels de première ligne et les usagers, et contribuer à une maturation et dynamique éthique du marché.
Un consensus s’est dégagé sur certaines de ses fonctions. Il s’agit a minima de prévoir un centre capable de mutualiser au niveau national des retours d’expériences « consolidés » dans l’usage des technologies en appui sur le réseau des livings labs, les gérontopôles, et autres lieux d’objectivation dans les territoires, et de développer des critères et méthodologies d’évaluation multidimensionnelles et partagés au niveau national.
D’autres options restent à arbitrer. Elles convoquent deux séries de pistes de nature distincte : des appuis au terrain pour favoriser l’appropriation des usages pertinents médiée par des tiers de confiance et des appuis aux industriels et investisseurs pour contribuer à la structuration d’une filière insuffisamment mature au stade actuel (opérateur de place de marché pour favoriser l’émergence de bouquets de service, développement d’outils d’évaluations socioéconomiques, sélection technologique des conseils départementaux, structuration d’ un réseau de recrutement et coordination d’expérimentation). Les modalités de déconcentration de la mise en œuvre du centre seront également à étudier...