Cette note analyse les risques liés à l’approvisionnement en « métaux mineurs » nécessaires à de nombreuses technologies d’avenir. Elle formule des recommandations de politiques publiques susceptibles d’accompagner les entreprises françaises et européennes et de les aider à renforcer leur stratégie d’approvisionnement et à améliorer leur compétitivité.
Les métaux critiques revêtent un caractère stratégique pour l’économie : ils sont aujourd’hui présents dans beaucoup de produits de consommation courante et dans de nombreuses technologies à haute valeur ajoutée, notamment dans le secteur des énergies renouvelables. Mais leurs spécificités exposent les industries importatrices à des risques d’approvisionnements et de compétitivité.
Ils se caractérisent ainsi par l’opacité de leurs transactions, réalisées « de gré à gré » sur des marchés non-organisés. Par ailleurs, leur; faible valeur commerciale contredit souvent leur importance économique, et peu d’industriels ont ainsi réalisé une véritable évaluation de leurs besoins. De plus, la concentration géographique des gisements en production crée un risque d’approvisionnement, car certains pays producteurs en positions monopolistique ont adopté des orientations stratégiques qui limitent leurs échanges commerciaux : c’est notamment le cas de la Chine. Enfin, certains métaux critiques sont aussi des sous-produits, dont la production dépend de l’extraction d’un métal primaire cristallise les problèmes liés à une offre inélastique et à un défaut d’évaluation de leur disponibilité déjà mentionnés.
La France et l’Union européenne ont pris conscience de la nécessité de sécuriser leurs approvisionnements pour préserver et encourager la compétitivité de leurs entreprises. Face à la volatilité des prix et aux difficultés ponctuelles d’accès, l’enjeu est d’une part de réduire durablement les prix à l’importation par la diversification des partenaires commerciaux et l’ouverture de nouveaux gisements, et d’autre part de diminuer le coût des matières premières dans les produits finaux par un soutien actif à la R&D (recyclage, substitution, économies de matières). Enfin, si les efforts de prospection minière que devront initier les Etats en bonne intelligence avec les populations locales s’avéraient concluants, ils pourraient conduire à une relocalisation industrielle sur le territoire européen.
Éléments clés :
- La production annuelle de métaux de base (fer, cuivre, zinc…) se chiffre en dizaines de millions de tonnes à la différence des métaux mineurs (d’une cinquantaine de tonnes pour le rhénium à moins de 200 000 tonnes pour l’antimoine).
- L’approvisionnement en métaux mineurs concerne avant tout les industries de la chimie, de la pharmacie, de l’automobile et de l’aéronautique qui représentent près de 680 000 emplois (2010) et devraient produire 33% de la valeur ajoutée de l’industrie française en 2030 (contre 25% en 2010).
- En 2012 la Chine a assuré plus de 80% de la production annuelle d’antimoine, de bismuth, de magnésium, de terres rares et de tungstène.
- 5 autres Etats occupent une position dominante sur ces marchés : le Brésil, les Etats-Unis, l’Afrique du Sud, la RDC et le Chili.
- La Commission européenne a lancé en 2008 l’initiative « Matières premières » qui englobe tous les enjeux relatifs à l’approvisionnement en métaux critiques - La France a créé en 2011 un Comité pour les métaux stratégiques (COMES)
Le CGSP formule sept propositions destinées à anticiper les problèmes d’approvisionnement et assurer la compétitivité de l’industrie :
- Rechercher sur le territoire la présence de métaux stratégiques en analysant les prélèvements de l’inventaire minier et en recourant à des méthodes de caractérisation depuis la surface et à des forages, dans le respect du Code minier.
- Développer la recherche portant sur les ressources minières sous-marines.
- Identifier les principaux besoins de rechercher liés à l’ « écoconception », au recyclage des métaux ainsi qu’à leur substitution et participer activement aux programmes de recherche communautaires.
- Renforcer les moyens du Comité pour les métaux stratégiques afin de publier, en collaboration avec le bureau des recherches géologiques et minières (BRGM) et en liaison avec les homologues européens de ces institutions, une prospective régulière sur l’accès aux métaux les plus critiques au cours des dix prochaines années et sur les stratégies possibles d’approvisionnement.
- Encourager la publication de données agrégées sur la production de sous-produits du cuivre, du nickel, du plomb et du zinc par les groupes d’étude internationaux correspondants.
- Développer, sur la base des organismes existants, des filières de formation spécialisées destinées aux jeunes diplômés et aux cadres, ouvertes à l’international avec l’attribution de bourses d’excellence.
- Au niveau européen, favoriser des partenariats entre industriels du même secteur et à différents niveaux de la chaîne de valeur sur le modèle de l’initiative lancée en Allemagne.