Quels sont les principaux facteurs structurels de ce ralentissement ? La crise financière de 2008-2009 a-t-elle joué un rôle ? Cette dernière question est d’autant plus importante aujourd’hui, alors que l’économie mondiale traverse une nouvelle crise économique.
D’après l’analyse économétrique menée à partir des données de comptabilité nationale, la France aurait connu trois ruptures structurelles dans la croissance de sa productivité du travail depuis le milieu des années 1970. Les deux premières seraient survenues en 1986 et 1993 et la dernière en 2004, soit bien avant la crise de 2008. Si aucune rupture structurelle n’est identifiée au moment de la crise de 2008, celle-ci a pu cependant amplifier temporairement le ralentissement antérieur identifié en 2004, du fait de son impact sur le financement de l’économie, du choc négatif pour les entreprises et des réponses de politiques publiques.
D’après l’analyse macro-économétrique, le capital humain contribue à hauteur des trois quarts des gains de productivité en tendance sur l’ensemble de la période. De fait, le capital humain aurait contribué pour 2,2 points à la forte croissance de la productivité, de 3,4 % en moyenne annuelle entre 1976 et 1986, avant de voir sa contribution diminuer progressivement pour atteindre 0,6 point depuis 2004, avec, de manière concomitante, la baisse des gains de productivité qui ne progressent plus que de 0,7 % par an. En effet, entre 1975 et 2000 la part des diplômés du secondaire dans la population active française est passée de 37 % à 68 %, celle des diplômés du supérieur de 10 % à 25 %, et en 2020, ces parts sont respectivement de 82 % et 40 %. Cela se traduit par un rythme de croissance annuel moyen de 2,5 % entre 1975 et 2000 pour le secondaire et de 3,5 % pour le supérieur, résultats qui ont diminué de 1,5 point et 1 point au cours des vingt années suivantes. Au total, même s’il n’est pas possible d’identifier une relation de causalité à partir d’une analyse macro-économétrique, et ce d’autant plus que les mesures du capital humain restent frustes, tout se passe comme si le ralentissement de la progression du niveau de formation initiale des nouvelles générations, là où hier, cohortes après cohortes, il augmentait rapidement, expliquait 59 % du ralentissement tendanciel de la productivité en France sur l’ensemble de la période. Au niveau de l’entreprise, la qualité du capital humain est fondamentale en ce qu’elle agit directement sur des déterminants mis en avant dans les études empiriques micro-économétriques comme la qualité du management et l’innovation, l’adoption de nouvelles technologies et les formes innovantes d’organisation du travail notamment.
La croissance de la composante « formation initiale » du stock de capital humain devrait demeurer stable au cours de la prochaine décennie, conduisant ainsi probablement à une stagnation des gains de productivité. Cela renforce la nécessité de travailler sur l’amélioration de la qualité des formations initiales et continues du point de vue des compétences non-cognitives notamment, ainsi que sur le développement des organisations apprenantes afin d’assurer une hausse plus dynamique de la qualité du capital humain en France et partant, des niveaux de vie.
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