Un club, c’est aussi un laboratoire où s’expérimente la confrontation entre les observations de terrain et celles de la recherche. La note du CAE Promouvoir l’égalité des chances à travers le territoire était une belle occasion que le club a saisie pour installer sa première équipe d’experts chargée d’étudier la croissance au regard de la compétitivité, de la solidarité et de l’interterritorialité. Pour que la croissance profite à chaque individu, quel que soit son lieu de vie, notre club devra identifier les actions publiques à mettre en œuvre ainsi que les instruments et outils à créer pour inscrire nos travaux dans le champ d’une prospective territoriale partagée.
Ainsi le 26 mars, sous l’animation de Jean-Pisani-Ferry, les premiers invités à venir débattre ont été, Philippe Askenazy et Philippe Martin. D’emblée, les auteurs ont indiqué avoir opté pour une approche iconoclaste de la thématique territoriale qui n’est cependant ni plus ni moins que celle des territoires et associations d’élus mettant l’homme et son environnement au centre de leurs travaux et actions. Si nous sommes d’accord avec eux pour dire que l’agglomération est un jeu à sommes positives qui peut permettre de dégager des marges de manœuvre pour la promotion d’une égalité des chances à travers les territoires, restent des divergences sur les recommandations. En outre, les auteurs reconnaissent volontiers que leurs travaux sont loin d’aborder toutes les problématiques, notamment sur les instruments disponibles pour promouvoir cette égalité de chances, et qu’ils n’ont pas traité tous les champs, tel que le champ environnemental par exemple, celui de la fiscalité aussi, mais plus particulièrement celui des inégalités observées au sein des métropoles qui engendrent par leur propre croissance de véritables poches de pauvreté pouvant à terme devenir aussi un frein à la croissance.
Établir un passage entre l’étude et l’action est un pari difficile. Les auteurs ont rappelé que leur rôle n’est pas de dire ce qui doit être fait mais de revisiter ce qui a été fait et d’en souligner les lacunes. L’humilité des « deux Philippe » démontre que la prospective doit s’appuyer sur des travaux de recherche universitaires mais pas seulement. L’émergence de systèmes productivo-résidentiels, d’écosystèmes, sont aussi des facteurs de croissance à prendre en compte.
A la suite de ce premier débat, nous nous sommes entendus sur ce que pouvait couvrir le thème étudié de la diffusion de la croissance. Ainsi la diffusion de la croissance pourrait se définir comme : une dynamique de la richesse créée dans un territoire particulier pouvant avoir un effet d’entraînement et permettant à la population ainsi qu’aux différents acteurs économiques des territoires voisins de bénéficier mutuellement de son rayonnement. Nous identifierons et étudierons donc tous les vecteurs pouvant contribuer à cette diffusion de la croissance sur les territoires. Nous rechercherons aussi quelles pourraient être demain, les actions publiques à engager, les instruments et outils à mettre en œuvre pour atteindre cet objectif d’un bénéfice partagé du développement économique au sein des territoires. Nous travaillerons également sur les indicateurs permettant d’évaluer (kits d’évaluation) les politiques publiques territoriales.
En termes d’objectifs à moyen terme, cette équipe d’experts souhaite pouvoir alimenter les « évènements » organisés par les territoires et s’en nourrir également, déboucher sur la rédaction d’articles publiés sur l’espace dédié sur le site Internet de France Stratégie et au sein de la News Letter du club de prospective territoriale, s’enrichir de débats que nous pourrions organiser à chacune de nos rencontres, aux fins d’un partage de connaissance des problématiques territoriales, enfin, co-produire des analyses que nous pourrions éditer sur une nouvelle revue de France Stratégie « les cahiers des territoires ».
Une feuille de route est arrêtée fixant l’organisation des travaux et des débats. Une première étape pour évaluer notre fonctionnement et nos productions pourrait s’imaginer en juin 2016.
Afin de nourrir nos travaux nous avons pensé inviter d’autres experts tels :
- Olivier Bouba-Olga (professeur des universités, CRIEF, université de Poitiers
- Michel Grossetti (CNRS, LISST-CERS, université de Toulouse Jean Jaurès), avec qui il écrit, ou à Gabriel Colletis (université de Toulouse, LEREPS) ;
- Les auteurs de l’étude sur les relocalisations des investissements productifs. On peut solliciter Xavier Ragot, qui en a été le concepteur (actuellement président de l’OFCE, conseiller d'Arnaud Montebourg quand il a conçu cette étude), El Mouhoub Mouhoud, professeur à Dauphine (GRI/CNRS/DREEM), qui a conçu et mis en œuvre la phase analytique, ou le cabinet Sémaphores (groupe Alpha), qui a réalisé 30 monographies. D’autres experts peuvent participer pour apporter une analyse et une expérience : Romain Pasquier, Nicolas Bouzou, Nadine Levratto, Denis Carré…Pour élargir le champ, ne pas le confiner à la seule lecture économique des enjeux, il sera utile d’inviter, le moment venu, des géographes (Daniel Behar, Philippe Estèbe et Martin Vanier, spécialistes de l’interterritorialité), des politistes, etc. Il s’agira d’articuler les questions d’organisation de l’action publique et de gouvernance aux conclusions des travaux économiques.
- Pour des comparaisons internationales l’OCDE
La diffusion de la croissance sur tout le territoire passe certainement par des politiques publiques plus ambitieuses sur le plan des mobilités, de la mobilisation de l’épargne, par le développement d’organisation en réseau comme les pôles métropolitains ou le soutien aux éco-systèmes. Nos travaux ne font que commencer et s’annoncent déjà passionnants !