Brune Poirson, secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la Transition écologique et solidaire, a saisi la Plateforme RSE de France Stratégie afin d’évaluer quelle pourrait être la contribution de la Responsabilité sociétale des entreprises (RSE) à l’atteinte des ODD.
Afin de comprendre la démarche et la méthode suivies par la Plateforme RSE, nous avons posé trois questions à Sylvain Boucherand, président de la Plateforme nationale RSE dont il est membre au titre de l’association Humanité et biodiversité. Expert des questions de développement durable, il est aussi engagé au sein de l’association 4D, membre du Conseil national de la biodiversité et du Conseil national de la transition écologique. À titre professionnel, il a cofondé et dirige la société coopérative d’étude et de conseil B&L évolution, qui appuie les grands groupes, les PME et les collectivités dans les démarches de durabilité. Il est également chef d’entreprise élu à la CCI de Grenoble.
Que sont les ODD et quel peut être l’apport de la RSE à leur réalisation ?
Les objectifs de développement durable sont les dix-sept priorités mondiales à l’horizon 2030 adoptées par l’Assemblée générale des Nations unies. Ils concernent la lutte contre la pauvreté et la faim, l’éducation et la santé, mais aussi le travail décent, le changement climatique, la biodiversité, les modes de consommation et de production durables.
Ainsi, au-delà des États, ces objectifs concernent tous les acteurs de la société : les collectivités, les citoyens, les associations, et bien sûr les entreprises.
Les démarches RSE, qui évaluent la prise en compte de l’impact des activités d’une entreprise sur l’environnement et la société, partagent un certain nombre de problématiques avec les objectifs, dont elles peuvent favoriser l’atteinte, les ODD définissant les axes prioritaires à intégrer. Les entreprises peuvent ainsi contribuer à cet agenda mondial en faisant évoluer leurs modes de management et de production : favoriser l’égalité femmes/hommes ; réduire les impacts de leur activité sur la biodiversité et le climat ; développer des produits ou services qui permettent de favoriser l’atteinte de ces objectifs.
Ainsi la RSE, qui questionne les stratégies d’entreprise, constitue un levier pour transformer le modèle économique afin de favoriser la réalisation des ODD.
Quelle a été la méthode de travail (composition du groupe, rythme, approche…) de la Plateforme RSE sur cette question ?
Nous avons été saisis avant l’été par la secrétaire d’État Brune Poirson pour faire des propositions sur la mobilisation des entreprises, leurs stratégies et leurs pratiques, vis-à-vis des ODD via l’étude de leurs interactions avec la RSE.
Nous avons alors formé un groupe de travail avec des membres de la Plateforme RSE issus de nos cinq pôles : entreprises et monde économique, syndicats de salariés, organisations de la société civile, monde académique et institutions publiques. Deux corapporteures ont travaillé à l’élaboration de l’avis : Emmanuelle Cordano pour le MEDEF et Bettina Laville pour le Comité 21, avec l’appui du secrétariat permanent. J’ai animé ce groupe au titre de l’association que je représente, Humanité et biodiversité.
Après quatre réunions et près de cinq cents amendements examinés, nous avons pu aboutir à quinze recommandations.
Quels acteurs sont concernés par vos recommandations, pour quels objectifs (chiffrage ou non, délais, etc.) ?
Nos recommandations s’adressent d’une part au gouvernement : il s’agit de porter les ODD à l’échelle nationale et internationale, en soutenant les négociations diplomatiques favorisant les ODD, en pesant sur la future Commission européenne, et en veillant à l’interministérialité de ses initiatives. La Plateforme RSE lui recommande également de mettre en œuvre des actions de communication et de sensibilisation à destination du grand public, et d’intégrer les ODD dans les critères d’achat public.
Aux entreprises, la Plateforme RSE recommande d’analyser leur activité sur l’ensemble de la grille de lecture des cibles des ODD pour compléter leur démarche RSE et identifier, le cas échéant, des opportunités d’innovation de produits et services ; d’introduire, lorsque c’est pertinent, les cibles des ODD parmi les critères de leur analyse de matérialité ; et d’intégrer les ODD dans les critères de l’investissement socialement responsable et de la finance durable.
Aux fédérations professionnelles, la Plateforme RSE recommande de favoriser l’intégration des ODD à la stratégie des TPE-PME en établissant des guides pertinents pour ces secteurs, et de prendre en compte les ODD dans les démarches des labels sectoriels RSE.
Aux partenaires sociaux, enfin, la Plateforme RSE recommande de faire des ODD un sujet du dialogue social, d’organiser des travaux prospectifs sur les ODD et la RSE et d’encourager l’intégration de cibles et d’indicateurs ODD dans la négociation d’accords de branche et d’accords-cadres internationaux.
Le bon accueil du rapport lundi par la secrétaire d’État laisse présager sa prise en compte dans les travaux en cours sur la feuille de route ODD de la France. Les ODD ont vocation à donner une direction claire vers le développement durable aux États et à l’ensemble des acteurs, et je suis sûr que les entreprises s’en saisiront comme certaines pionnières ont commencé à le faire.
La Plateforme RSE suivra ces travaux et la mise en œuvre de nos recommandations !